Une complémentation mal ajustée coûte cher aux élevages bovins viande
La mauvaise qualité des fourrages de 2024 implique une complémentation ad-hoc pour garder le cap des performances des élevages de vaches allaitantes.
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Les rations des vaches allaitantes n’ont pas été faciles à équilibrer cette année en raison de la qualité modeste des fourrages. « La matière azotée totale (MAT) des enrubannages était basse aussi bien pour ceux récoltés précocement que pour ceux récoltés tardivement », observe Antoine Buteau, ingénieur régional en fourrages à la ferme expérimentale des Bordes à Jeu-les-Bois, dans l’Indre.
Les valeurs des précoces s’affichaient à 11,6 %, soit –0,5 % que la moyenne 2023 sur la ferme des Bordes, tandis que celles des tardifs étaient à 7,3 %, soit 3,3 % de moins que la moyenne. « Le temps froid et humide, responsable d’une mauvaise photosynthèse ou de lixiviation de l’azote, a nui aux chantiers précoces tandis que les chantiers tardifs, qui se sont déroulés en moyenne avec un mois de retard par rapport à d’habitude (+33 jours), ont entraîné des valeurs en protéines et en énergie faibles et des encombrements élevés.
Les foins aussi étaient déficitaires. Résultat, les apports de concentrés supplémentaires se révèlent nécessaires pour satisfaire les besoins des animaux. Les calculs effectués par la chambre d’agriculture de l’Indre montrent que les vaches charolaises au pic de lactation, nourries avec du foin et de l’enrubannage, ont besoin de 2,8 kg de triticale et 0,8 kg de tourteau de colza par jour.
79 € par vache en plus
En année fourragère moyenne, l’incorporation de tourteau de colza n’est pas nécessaire, et l’apport de 1,5 kg de céréales suffisait. Au total en 2024, à l’échelle du troupeau entier (100 vaches et leurs suites) en comptant l’équilibrage des régimes des génisses, il a fallu acheter 12 tonnes de tourteau de colza et 17,7 tonnes de céréales en plus. « Cela représente un coût supplémentaire de 7 860 € (4 320 € pour le colza (320 €/tonne) et 3 540 € en plus pour les céréales (200 €/t), note Jean Baptiste Quillet de la chambre d’agriculture de l’Indre. Ramenée au vêlage, la dépense supplémentaire est donc de 79 €. »
Des risques importants
Même si les trésoreries sont souvent exsangues, cette somme est à comparer au manque à gagner auquel on s’expose. « Les conséquences de la mauvaise alimentation ne se mesurent pas immédiatement et s’installent au fil du temps », indique l’expert. La mise à la reproduction se passe moins bien. L’intervalle entre vêlages (IVV) s’allonge. Ainsi, un élevage de 100 vaches dont l’IVV augmente de 30 jours, en passant de 365 à 395 jours, enregistre une baisse des naissances de huit veaux sur une année. (30 jours x 100 vaches = 3 000 jours de perdus : 365 (1 veau/vache/an) = 8,2 veaux).
Les animaux vendus en moyenne à 1 450 €, la perte s’établit donc à 11 600 €. Ces huit veaux n’ont toutefois pas consommé de concentrés (500 kg x 8 à 350 €/t), ce qui représente une somme non dépensée de 1 400 €. L’impact économique de l’augmentation de l’IVV s’élève donc à 10 200 € (11 600 – 1 400).
L’alimentation déficitaire entraîne aussi des retards de croissance sur les broutards. Or, 80 g de moins par jour sur 240 jours, c’est un broutard qui pèsera 19,2 kg de moins. Sur 90 veaux, c’est l’équivalent de 1 728 kg qui ne seront pas vendus, soit 6 566 € de manque à gagner (3,8 €/kg). L’allongement de l’IVV et de mauvaises performances de croissance peuvent se traduire par un manque à gagner de près de 16 800 €. Un chiffre persuasif pour déclencher une complémentation adéquate avant la fin de l’hivernage. « Surtout avant la mise à la reproduction, il est important que les animaux soient en situation de prise de poids », souligne Antoine Buteau.
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